Conférence
samedi 16 mai
de 11h05 à 13h00
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L’échec programmé des paix communes en Grèce (4e s. av. J.-C.)

En 386 av. J.-C., Sparte tenta d’imposer aux Grecs une « paix commune ». Or, ce fut un échec, notamment parce que la cité cherchait d’abord à renforcer sa puissance au détriment d’Athènes ou de Thèbes. Pour garantir la paix, elle organisa même des guerres punitives et abusa de sa position. Ces accords de paix ne firent que masquer les velléités hégémoniques des cités.
Sparte, qui était à cette époque la principale puissance politique et militaire de la péninsule hellénique, s’est entendue avec le Roi de Perse, qui arbitrait les conflits entre Grecs grâce à son or, afin d’imposer aux Grecs une « paix commune » (koinè eirènè) à l’occasion d’un Congrès qui s’est tenu à Sparte même.

Cette paix fut un échec, de même que toutes les autres tentatives qui ont vu le jour dans les décennies suivantes, et cela pour plusieurs raisons, dont voici les principales :
– Sous couvert de garantir l’autonomie à toutes les cités grecques, grandes ou petites, le traité ordonnait la dissolution de toutes les ligues et alliances préexistantes entre les cités, ce qui eut pour conséquence – et constituait en fait l’objectif masqué du projet – de renforcer davantage encore la puissance de Sparte au détriment de ses rivales, Athènes et Thèbes, qui aspiraient elles aussi à l’hégémonie.
– Sous prétexte d’assurer le respect des clauses, le traité donnait à Sparte le rôle de « gardienne de la paix » et prévoyait des guerres punitives contre les cités qui violeraient le traité, sous sa conduite. Les Spartiates ont usé et abusé de ce droit pendant 15 ans, afin de mettre au pas leurs rivaux, qui n’étaient pas dupes. Ces derniers tentèrent d’ailleurs de reprendre le modèle à leur compte en élaborant leurs propres paix communes après la défaite de Sparte en 371, qui entraîna le déclin irrémédiable de sa puissance.
– Le traité était supposé apporter la paix à tous les Grecs, mais dans la réalité, les cités grecques d’Asie mineure ont été « données » ou plutôt « rendues » par Sparte au roi de Perse, qui en revendiquait la suzeraineté depuis un siècle et qui offrit en échange à Sparte son aide militaire et financière : cet accord a été perçu comme une véritable trahison par une partie de l’opinion publique. De même, les cités grecques de Sicile et d’Italie n’ont jamais été conviées à ces congrès pour la paix.
– Sur le plan institutionnel, ces accords de paix n’ont pas prévu de structures permanentes (assemblée annuelle des délégués des cités et/ou tribunal d’arbitrage), qui auraient permis de débattre sereinement des problèmes et de consolider les liens entre les cités, plutôt que de recourir à la menace et aux armes aussitôt que Sparte, et elle seule, estimait que le traité avait été violé.
En résumé, aucun de ces accords, à l’exception du traité de 362, qui fut lui aussi de courte durée, n’émanait de la volonté sincère d’apporter une paix durable à tous les Grecs, ils ont été des instruments au service des velléités d’hégémonie de Sparte, puis d’Athènes et enfin de Thèbes.

Le professeur Pierre Sanchez sera présenté par Michel Grandjean, professeur d’histoire du christianisme à l’Université de Genève.

Lieu
Uni Dufour , Salle U300